Big Data et Open Data : vous entendez beaucoup ces mots sans forcément savoir à quoi ils correspondent. Le Big data, c’est l’information de masse, et l’open data c’est la libre circulation de cette information. Deux notions a priori bien loin de notre métier. Et pourtant ! Les grandes manœuvres qui se jouent en ce moment, et dont la loi de Santé n’est qu’un épisode, ont toutes pour but de s’assurer le contrôle d’une richesse extraordinaire sur laquelle nous sommes assis sans le savoir. Le fameux Big Data.

La masse des données médicales que contiennent nos dossiers est, pour autant qu’elles soient exploitées, une ressource financière extraordinaire. Mais qui en profitera ? Organisées, séquencées et couplées à d’autres données fournies à l’insu de leur plein gré par nos patients hyper connectés, grâce aux GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), au travers de leurs smartphones et montres, ces données représentent le rêve de l’assureur.

Elles permettront de prévoir par des algorithmes l’évolution de tel ou tel patient en fonction des données recueillies et détermineront le montant de sa prime d’assurance. Surtout avec un séquençage d’ADN obligatoire avant la signature de tout contrat. Google le propose déjà pour 99 dollars.
L’assureur informé grâce à l’Open data, est alors à même de déterminer la meilleure stratégie thérapeutique et de proposer à son patient-client de se tourner vers le médecin—prestataire-contractualisé pour mettre en application un traitement « e-optimisé ».

Ce monde cauchemardesque du « disease management » est en marche et nous menace si nous n’y prêtons pas attention.
La loi de santé était l’occasion de réussir le virage ambulatoire, consacrant la place centrale du médecin traitant et la relation singulière, humaine, éthique, médecin-patient comme le cœur du système de soin. C’est raté !

La loi de santé était l’occasion de réaffirmer l’attachement de la nation au système de soins solidaire qui est le nôtre. Mais, le tiers payant généralisé obligatoire en incitant les médecins à contractualiser individuellement avec les opérateurs de soins peut constituer (outre la charge de travail ingérable qu’il représente) le début du scénario décrit. Ce qui explique les réticences de l’ensemble du corps médical.

Il appartient aux médecins généralistes et aux patients de résister à ce monde merveilleux pour les assureurs et cauchemardesque pour les utilisateurs, où la normalisation des thérapeutiques constituera la négation de l’essence même de notre métier, basé sur la richesse et la singularité de la relation humaine.

J-C Calmes