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Pierre Tryleski, généraliste à Strasbourg : "J'aime mon métier"

" La médecine d’excellence se faisait au CHU. Quand j’ai commencé mes remplacements en médecine générale, j’ai senti que je changeais de monde. J’étais passé de l’autre coté du mur, qui séparait mes copains hospitaliers des médecins de l’extérieur, des libéraux.


Pour m’installer, les choix étaient réduits. Soit je rachetais la patientèle d’un généraliste qui terminait sa carrière, pour 50 % du CA annuel, soit je créais un cabinet. Mais c’était très risqué. Beaucoup de jeunes médecins généralistes se cassaient la figure. Même à la campagne, les choses pouvait mal se passer. Aussi ai-je choisi de créer. Voulant rester en ville où j’avais fait ma vie, je me suis installé en banlieue, dans une cité HLM. Je ne voulais pas faire de la médecine clientéliste, et j’évitais le centre ville hyperconcurrentiel. Je voulais que mon métier soit utile, c’est à dire auprès des personnes en difficultés d’un quartier de Strasbourg. Les collègues installés sur le même quartier, portant très peu nombreux et débordés, ont vu d’un mauvais œil cette création modeste : je marchais sur leurs plates-bandes !

Je n’ai pas démarré très vite : trois, quatre patients par jour au début. Il fallait que je travaille en plus de mon activité libérale, comme préleveur au Centre de Transfusion Sanguine. Pour rentabiliser, pour créer la patientèle, il fallait faire de la présence, et répondre aux demandes de visite, faire des gardes, la nuit sans repos compensateur le lendemain matin, les WE, les jours fériés. Les gardes n’étaient pas régulées : je prenais le téléphone, et j’étais souvent appelé directement, pour des broutilles en soirée, des choses plus graves vers 4h du matin. Ces appels au petit jour m’inquiétaient. Lorsque c’était le SAMU qui me contactait, c’était souvent pour des cas pas clairs, hasardeux, qu’il fallait que j’aille débrouiller. Parfois même dangereux.

Et puis les choses ont changé. Un confrère s’est installé à proximité, mais a déplaqué rapidement. Car cela ne marchait pas. Il n’y a plus eu par la suite de nouvelle installation, même dans la partie plus bourgeoise du quartier. Les anciens ont pris leur retraite et ont été remplacés, l’un par sa fille, l’autre par une ancienne remplaçante. Nous avons arrêté de faire des gardes et SOS médecins a pris la place libre. Tous étaient satisfaits, nous pouvions dormir la nuit et être frais le matin. De plus nous échappions aux appels tordus ou pas respectueux.

Les plus pauvres de mes patients parfois ne me payaient pas. Ils me laissaient une facture sur les bras. Je n’allais pas les poursuivre pour moins de cent francs ! Certains disposaient de bons d’aide médicale, qui étaient contingentés et qu’ils devaient aller chercher chez l’AS avant de passer chez le médecin. Une de mes patientes est morte durant la période où elle n’avait pas de bons. Elle n’osa pas m’appeler et ne pouvait de toute façon pas acheter les médicaments. Je devais envoyer ces bons sous forme de note d’honoraire en fin de chaque trimestre et j’étais payé quelques mois plus tard. C’était toujours mieux que de rester sur des impayés.

La CMU a changé le monde du médecin et des patients pauvres. Tout a été plus simple et plus efficace. Je n’ai plus quasiment eu d’impayés et les gens se soignaient sans hésiter. C’est pour ça que chaque fois que je le peux, je fais du tiers payant, même pour les plus riches. Même tarif pour tous et tout le monde est satisfait. En plus, je n’ai pas trop d’argent avec moi, et ce n’est donc pas tentant pour les voleurs.
Mon cabinet d’association a pris de l’ampleur. J’ai accepté de devenir enseignant. J’ai reçu des stagiaires, des « Canada dry », ces résidents en médecine générale qui étaient méprisés par les internes de spé au CHU, puis des internes en médecine générale. Je suivais des FMC, du Balint, des séminaires de formation. J’ai demandé et obtenu la validation de ma spécialité de médecine générale : j’étais fier !

Puis une 3ème associée nous a rejoint. Nous avons a déménagé de notre cabinet bricolé dans un appartement HLM pour un « vrai » cabinet spacieux, avec salle de réunion et un secrétariat ! Un secrétariat vide au début car nous n’avions pas les moyens. Puis on s’est informatisés. Quelles galères ! A la merci des prestataires, pieds et poings liés par des systèmes fermés. Mais nous nous sommes développés dans ce contexte, avec suppression progressive du papier, arrivée des mails et archivage des documents. Enfin une secrétaire est arrivée ! Un vrai bonheur, les consultations sans être interrompues par le téléphone toutes les deux minutes, cela a été génial.

Un jour une évidence s’est imposée : nous atteignions des limites de nos capacités d’intervention. Les cas « simples » étaient assumés par SOS à domicile, nous nous occupions des cas complexes. Cela prenait beaucoup de temps, pour peu d’efficacité. Alors l’idée de former une maison de santé pluriprofessionnelle – une MSP - s’est imposée. Nous y sommes aujourd’hui.

J’aime mon métier, même si parfois, je me trouve en rage lorsque je suis méprisé par une élite spécialisée, que je me heurte à des murs administratifs. Mais j’aime reprendre après les vacances, retrouver les patients que je connais, enseigner, rencontrer des histoires toujours passionnantes, avoir l’impression d’être utile, accompagner des éclosions de personnalités.

Le syndicalisme m’a permis de défendre ce métier, de valoriser ce savoir faire et cette fonction tellement précieuse dans la société. MG France est le syndicat qui défend au plus près ces valeurs qui me sont chères, je m’y suis engagé. A l’URPS des médecins libéraux, j’ai pu travailler à des actions passionnantes. J’ai contribué à mettre en place et animer un dispositif d’appui aux médecins de ville lorsqu’ils reçoivent des patients non francophones, par la mise à disposition d’interprètes professionnels sans frais ni pour eux ni pour les patients. J’ai rencontré des professionnels non médecins qui s’occupent de la santé des populations pour confronter nos points de vue. J’ai pu participer à l’écriture du projet régional de santé, travailler avec les CPAM, pour faciliter les paiements des tiers payants sur FSP, échanger avec les acteurs de l’Observatoire de la Santé, ou encore contribuer à des actions d’éducation à la santé, ou de développement d’outils de liaison ville hôpital.

Je veux poursuivre ce travail de promotion de la médecine générale, de développement des soins primaires, soutenir les valeurs de solidarité et m’opposer aux réactions de repli vers l’individualisme qui tente tellement de personnes. La loi de santé, qui était prometteuse, s’est embourbée dans des compromis pseudo idéologiques, mettant en place un tiers payant impossible à appliquer, et rejetant sur les professionnels de santé le risque de l’impayé. Cette stratégie a promis la place centrale à la médecine générale, mais ne lui en donne pas les moyens, préférant miser sur les structures hospitalières, et les soi disant expertises des élites spécialisées, seules reconnues comme autorités. Les ARS sont devenues dans cette loi des gendarmes de l’organisation des soins, faisant la loi et dictant les devoirs aux médecins. Je veux la voir évoluer, et retrouver le sens de la Stratégie Nationale de Santé.

Il y aura du travail pour les syndicalistes dans la nouvelle URPS : respect des diversités des départements d’une très grande région, valorisation des actions de proximité, mais poursuite du développement des soins primaires par toute la région.


Pierre Tryleski
 

 

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