Accès aux soins

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N°0

Paradoxes
Les élus locaux ont été soumis à une forte pression sur les questions d’accès aux soins avant les élections municipales ; le colloque qui avait été organisé par MG France début 2020 leur avait d’ailleurs donné l’occasion d’exprimer cela et de mettre en avant ce qui est en leur pouvoir pour améliorer la situation : locaux, argent public, bonnes paroles... Pourtant, les médecins généralistes ont appris à se méfier de tout ! Notamment des injonctions paradoxales.

La réalité est très contrastée et multiforme. Les départs en retraite de médecins généralistes sont nombreux, de l’ordre de 9 000 par an, quand les jeunes terminant leur formation ne sont que 3 000 chaque année. L’ordre de grandeur de la pénurie annoncée est dans ces chiffres. Des initiatives de terrain, géniales, comme Asalee ou les ESP CLAP, montrent la voie pour y remédier. Car l’activité des médecins généralistes se transforme de jour en jour. Et les injonctions paradoxales pleuvent !

Pallier la pénurie de médecins spécialistes de second recours oblige les généralistes à hausser leur niveau de formation, formation qu’on leur complique et leur rationne !

Faire face à la flambée des maladies chroniques chez leurs patients les oblige à un suivi rigoureux de nombreux paramètres, on les y encourage tout en leur reprochant de trop prescrire.

Prendre en charge les patients en demande de soins non programmés est aussi une de leurs missions mais on leur refuse tout à la fois la visibilité de leur offre (numéro d’appel 116-117) et les moyens de l’organiser...

Prendre  des  gardes  est  un  devoir  classique  des  médecins,  spécialement  des  généralistes que les gouvernants verraient bien travailler 24h/24, mais... sans rémunérer l’effort titanesque que cela représenterait. On leur demande juste de s’organiser, pas de travailler 24h/24 individuellement. Ce à quoi ils répondront immanquablement que sans moyens et en sous-effectifs, s’organiser...

Les réponses au vrai problème posé, celui de l’accès aux soins, sont ailleurs. Par exemple dans l’organisation des soins primaires. Les moyens mis sur les CPTS sont un bon début. Mais un début chaotique, quand tant de porteurs de projets nous font part des bâtons mis dans leurs roues par une administration tatillonne qui devrait pourtant les aider. Toujours le paradoxe latent.

De même dans le combat que mène MG France pour une réorganisation de la PDSA. Les généralistes épuisés ferment leur cabinet bien avant que sonnent 22 heures (allusions aux propos du président de la République) et ils ferment le samedi matin... Comment leur reprocher de ne plus vouloir travailler 60 heures par semaine ? Là encore nous proposons de l’organisation, le début de la PDSA à 18 heures au lieu de 20 h en semaine, le début de la PDSA à 8 h le samedi matin.

Une organisation légère destinée à diminuer le temps « obligatoire » de sujétion des médecins généralistes. Un point de garde pour que la population soit en sécurité, du temps choisi pour les autres généralistes. Un peu d’attractivité pour ce dur métier. Une organisation qui ne coûte presque rien... mais qui bute sur des problèmes de réglementation. Des problèmes qu’on pourrait résoudre vite. Mais... non. Par exemple encore dans la revalorisation de la visite à domicile.
Une population vieillissante, pas besoin d’avoir fait polytechnique, implique beaucoup plus de patients dépendants. Et tant leurs souhaits constamment manifestés que les capacités limitées d’accueil en établissement montrent que la dépendance à domicile devra être prise en charge de façon croissante. Quels médecins se déplacent à domicile ? Les généralistes. Ils sont en première ligne. Sans une valorisation importante de ce type de prise en charge, peut-on imaginer le maintien à domicile de nos patients âgés ? Face à cette évidence, du temps et des obstacles. L’obstacle majeur, comme toujours, étant « vous vous rendez compte de ce que ça coûte ? ». Comme si ne rien faire n’était pas chaque jour un peu plus coûteux...Il est de bon ton de célébrer la valeur du « terrain ». Sans la pousser trop loin, on pourrait parfois la prendre en compte ?