N° 36 - 18 février 2015
 

Loi de santé : il faut négocier le virage

Bernard Plédran

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Cette semaine, j’ai eu un petit moment pendant lequel j’ai pu regarder la télé. Le délicieux Stéphane Bern nous a rappelé, avec toute la gravité et la compassion qu’il sied, l’histoire de cette princesse qui n’a pas pris le virage. Avec les conséquences dramatiques dont on se souvient.
Pour notre système de santé c’est pareil : il va falloir le prendre ce virage des soins ambulatoires, à défaut de nous retrouver dans le mur, ou le ravin. Et cela pourrait faire mal. Très mal.
Cette capacité que nous avons, en France, à bien analyser les situations, à comprendre les problèmes est étonnante. Et surtout à ne rien faire pour changer les choses. Sauf quand, vraiment, on ne peut plus faire autrement. Mais que de fatigue, que d’énergie perdue ! Surtout que nous ne sommes pas tout à fait ni iconoclastes, ni isolés. Plusieurs pays l'ont, depuis longtemps, compris : pour bien soigner les gens, et le faire au juste prix, il faut, d’une part, organiser le système de soins et, d’autre part, le centrer sur les soins primaires et le médecin généraliste. En mettant bien sûr les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs.
MG France organise dans cet objectif un colloque, le 5 mars prochain et réunit le président de la FMOQ (Fédération des Omnipraticiens du Quebec), un généraliste allemand et un écossais, qui connaissent chacun, dans leur pays respectif, des problématiques similaires aux nôtres et les solutions pour y répondre. Mme Fleury Pelletier, économiste de la santé, Patrick Bouet, président du Conseil National de l’Ordre des médecins, et Yann Bourgueil, de l’IRDES, seront également présents pour donner leurs éclairages, discuter, débattre.
L’évolution de notre système de soins ne relève pas que de la seule responsabilité des politiques et des décideurs. C’est aussi la nôtre, médecins généralistes, dans nos villes, nos quartiers, nos campagnes, de prendre conscience du rôle essentiel, fondamental qui est le nôtre ! Nous n’avons aucun complexe à avoir face à d’autres spécialistes des soins secondaires, qui font un métier sûrement essentiel, mais qui ne recouvre pas l’ensemble des champs que nous occupons. Et dont nos patients ont tellement besoin.

N'hésitez pas à venir à notre colloque et à vous y inscrire sur notre site Internet.… et après avoir participé au colloque le 5 mars, nous pourrons nous dégourdir les jambes le 15 mars pour une manifestation nationale dans les rues de Paris avec les étudiants en médecine

Le syndrome du pompier pyromane

J-C Calmes

En novembre 2014, le Front généraliste (lien avec site) a lancé un mouvement de contestation demandant à ce que la future loi de santé donne lieu à une véritable refonte de notre système de santé. Ce qui était, au départ, un incendie facile à circonscrire est aujourd’hui en train d’embraser l’ensemble du monde médical. Il faut dire qu’en alimentant régulièrement l’incendie et en s’abritant derrière des écrans de fumée, Marisol Touraine se comporte en pompier pyromane.

La loi de Santé doit être réécrite. Sur ce point, tout le monde est d’accord. Ou presque ! Marisol Touraine a proposé initialement une écriture en 15 jours avec une date butoir le 15 février. Tout en sachant très bien que rien de sérieux ne peut aboutir dans ce délai. Raison pour laquelle elle vient de repousser son délai...au mois de mars.
Les spécialistes en médecine générale sont économiquement discriminés. Seule spécialité à ne pas pouvoir coter la MPC (Majoration Pour acte Clinique), les médecins généralistes voient leurs consultations minorées de 2 euros de moins que les autres. Marisol Touraine renvoie la discussion vers la CNAM. Nicolas Revel, nouveau patron de l'Assurance-maladie, en bon soldat, repousse la discussion à la prochaine convention, qui devrait se dérouler après les élections professionnelles, qui elles-mêmes restent à définir, réforme des régions oblige, etc. Nouvel enfumage…

Unité médicale

Les spécialistes en médecine générale doivent se former régulièrement et être indemnisés pour cela. C’est en tout cas ce que prévoit la convention (annexe XVI). Ce qui n’empêche pas l’OGDPC de réduire cette formation comme peau de chagrin à une journée par an…Silence radio sur le sujet.
Quant au tiers payant, principal sujet de discorde, Marisol Touraine se réfugie derrière le Président de la République, qui nous assure, que « le tiers payant ne sera mis en place que si un mécanisme simple est trouvé pour les professionnels de santé »…
En multipliant les écrans de fumée Marisol Touraine cherche à gagner du temps. En politicienne accomplie, elle mise sur le temps pour calmer la colère, sur la distance, pour essouffler les médecins, sur les élections à venir pour les voir se diviser.
Mais l’unité médicale est bien là. La grève s’installe dans la durée, et les médecins ont du souffle. Témoignant de la gravité de la situation, la question de la survie du secteur 1 est clairement posée. Attendre une nouvelle convention pour réagir serait une erreur politique grossière tant la colère gronde.

Le 15 mars à Paris et le 19 mars en fermant nos cabinets nous montrerons une fois de plus notre détermination.
 

Formation : que devient le DPC ?

J-C Nogrette

Quand on est médecin, il faut entretenir ses connaissances. Les généralistes les entretiennent, qui dirait le contraire ? 43 800 médecins - sur 110 000 libéraux - ont suivi un programme de DPC en 2014. Mais pour qu'ils puissent le faire, le législateur a conçu un système compliqué, réducteur, étriqué, totalement inadapté à l’étendue des besoins de formation des généralistes.

Et le Développement Professionnel Continu (DPC), que devient-il ? Quand on est médecin, il faut entretenir ses connaissances. Nous les entretenons. Qui dirait le contraire ? Le législateur. Le législateur fait les Lois. Entretient-il ses connaissances ?
Question perfide. Alors voyez plutôt…
Prenons un médecin généraliste. Vous savez, ce curieux spécialiste de santé diffuse, qui sait, en matière de santé, “presque rien sur presque tout” quand les spécialistes de “haute précision” savent “presque tout sur presque rien”. Un médecin généraliste donc, normal, proche des gens.
Ce médecin généraliste là se formait officiellement peu, avant le DPC. Ou plutôt, soyons francs, on ne savait pas trop comment il se formait. Environ 18 000 médecins suivaient chaque année une ou plusieurs formations indemnisées. Et les autres ? Ils ne se formaient pas du tout, vous croyez vraiment ?

Le législateur a travaillé (Loi HPST, 2009) et maintenant, Monique Weber (La “patronne” de l’OGDPC ) s’en félicite, tout va bien, puisque 43 800 médecins ont suivi un programme de DPC en 2014, 43800 sur 110 000 libéraux (MG et autres spécialités). Le législateur doit être content. Il y a des chiffres, et des chiffres en hausse. Et dans les 17 professions de santé, parmi les 500 000 professionnels libéraux, 129 000 ont été formés. Alléluia !
Notre médecin généraliste, pourtant, avant l’OGDPC, avait la possibilité de participer à 8 jours de formation indemnisée par an. Formation indépendante, validée scientifiquement, mais pas moderne. C’était “Cognitif”. En français : avant on allait à un séminaire de formation, on écoutait bien, on participait un peu, on améliorait un peu ses connaissances (cognitif). Et on était un petit peu obligés mais pas trop, donc tout le monde n’y allait pas… Le législateur n’était pas content.
Maintenant, notre médecin généraliste a droit à l’OGDPC. Seulement un programme de deux jours de formation par an. Oui, mais de la bonne formation ! “Analyse de pratique-Formation Cognitive-Évaluation”. En français : On note sur une grille quelques cas rencontrés “en vrai”. On se forme “Cognitif”. Puis on rediscute un peu de ses cas “en vrai” après.
DEUX jours par an. DEUX, versus HUIT ! Est-ce mieux ? Le médecin généraliste n’est pas content ! Le médecin généraliste n’est pas content parce que suspecté de ne rien faire pour se tenir à niveau. Il est vrai que les médecin généraliste n’allaient pas en congrès aux Bahamas, leur formation était donc peu…visible.
Le médecin généraliste n’est pas content parce que pour remédier à sa supposée paresse intellectuelle jamais démontrée, on lui a construit une “usine à gaz” nommée OGDPC qui, avec UN programme de DEUX jours par an, prétend résoudre le problème de sa formation ! Ça va tout changer dans sa pratique…
Le médecin généraliste n’est pas content parce que ses besoins de formation sont bien plus importants que ça mais ce qu’on lui propose, objectivement, c’est de cocher la case OGDPC une fois par an et pour le reste…Se débrouiller (restons polis) comme d’habitude. Et par ses propres moyens.
(Les pilotes d’Air France se paient eux mêmes leurs formations sur simulateur de vol, peut-être ?)
Au lieu de regarder ce qui fonctionnait et d’essayer de rendre cela plus incitatif, plus qualitatif, pour plus de professionnels, le Législateur a conçu un système compliqué, réducteur, étriqué, totalement inadapté à l’étendue des besoins de formation des MG, géré par des comptables dans le but inavoué de “faire des économies”. On prétend avoir réglé le problème.
Une fois de plus la médecine générale est maltraitée.
Alors, une proposition : et si on envoyait le législateur…en formation !

Accessibilité des cabinets médicaux :
MG France fait le point.

Gilles Perrin et Bruno Deloffre

MG France a rencontré la sénatrice Claire Lise Campion, rédactrice du rapport sur l'accessibilité, et a interrogé la délégation interministérielle à l'accessibilité sur la pérennité des dérogations en cas de succession, la responsabilité vis à vis des normes entre professionnel et propriétaire du local, et les perspectives d'installation au-delà du 27 septembre 2015. Des réponses qui intéresseront plus d'un médecin libéral.

1/ Si le médecin est locataire, c'est le propriétaire du local qui doit déposer l'Agenda d'Accessibilité et les éventuelles demandes de dérogation.
Le locataire n'a à se préoccuper que des petits aménagements au sein du local, à moins que le bail ne prévoie expressément autre chose.
Ce point est celui qui va poser le plus de problèmes aux médecins locataires, car ils ne disposent d'aucun moyen légal si le propriétaire ne veut pas se mettre en règle, alors qu'au final, c'est le locataire qui est pénalement responsable en cas de non application des textes (amende de 45 000 euros, voire fermeture administrative de l'établissement)

2/ Pérennité de la dérogation
A partir du moment où c'est le local qui se voit obtenir une dérogation, via la demande du propriétaire, la pérennité est assurée.

3/ Cessibilité de l'Agenda d'Accessibilité
En cas de succession en cours d'Agenda d'accessibilité programmée (AdAP), le successeur reprend à son compte l'agenda. Cela devra être intégré au contrat de cession (avec notamment un état de réalisation des travaux au moment de la cession)

4/ Au delà du 27/09/2015, les installations doivent se faire dans des locaux aux normes (sauf dérogation si le professionnel prouve qu'aucun local accessible n'est disponible aux alentours )

MG France va continuer à dénoncer les incohérences de cette loi et porter des mesures de simplification sur ce dossier qui peut représenter une bombe dans l'accès aux soins.

 

Etre femme médecin : une pratique différenciable ?

Isabelle Leclair

Parce que plus abordable, moins impressionnable, souvent plus petite voire plutôt jolie et pas trop âgée…. la femme médecin souffre d’un manque de reconnaissance et de respect et cela commence dès le début des études.
En tant qu’interne, combien de fois sommes-nous passées pour l’infirmière ou pour la secrétaire ? J’ai été étonnée d’apprendre par mes jeunes internes qu’en 2015 cela était toujours d’actualité. Apparemment, le médecin reste un homme dans l’imaginaire. Pourtant, nous ne soignons pas moins bien que nos confrères masculins. Nous pratiquons différemment. Nous prenons en moyenne plus de temps avec les patients, avons plus de mal à dire non et manquons d’autorité naturelle. Les patients ont tout autant à gagner de cette double pratique homme/femme et de la possibilité d’accéder à ces regards différents.
Le quotidien reste parfois violent pour moi.
Un nouveau patient reçu en urgence 6 jours avant. Je l’appelle vers 20h pour lui demander de venir chercher une ordonnance le lendemain, son ECBC étant revenu positif. Il m’envoie bouler. L’anesthésiste vu le jour même lui a dit que ce n’était rien et de quoi je me mêle et pourquoi je l’appelle à cette heure-là... M’aurait-il parlé différemment et avec un peu plus de respect si j’avais été un homme?
Avant 19h15, c’est la maman d’une patiente de 20 ans, le gynécologue ne répondant pas (oui il a raison lui, d’être rentré chez lui) qui me demande de lui expliquer pourquoi il a fait un frottis et comme le HPV est positif, faut-il une coloscopie en urgence et combien de chance elle avait d’avoir un cancer …. Comment justifier ce qu’un autre a fait sur un sujet aussi délicat quand la salle d’attente n’est pas encore vide ? Si j’avais été un homme aurait-elle appelé à 19h15 et autant insisté ou aurait-elle attendu le lendemain pour rappeler le spécialiste ?
Dans la journée, j’ai dû remplir un document intitulé « contentieux entre le Dr Isabelle Leclair et le Dr Tartenpion, médecin conseil » à remplir en 4 exemplaires et à renvoyer par ma pomme. De quoi je me mêle encore ? Si j’avais suivi l’avis du médecin conseil et fait reprendre le travail comme tout le monde à une patiente de 40 ans qui porte un corset jour et nuit, j’aurai eu une paix royale. Là rien à voir mais c’était un truc en plus dans la journée.
Et la patiente de 42 ans que j’ai envoyée à l’hôpital pour sa grossesse que je ne peux pas suivre et qui arrive en pleurs au cabinet le triple test est « positif » mais qui ne sait pas que l’amniocentèse est fortement recommandé à son âge et qui n’a pas eu cette information !!! Mais pourquoi ? Et bien je n’en sais rien ! Comment justifier ou expliquer ce qu’un confrère a fait alors que l’on n’est pas dans sa tête parce que l’on n’est pas forcément d’accord, mais comme c’est nous qui sommes accessibles, c’est vers nous que l’on se tourne… Si j’avais été un homme serait-elle quand même venue avec toute sa détresse à la sortie de l’hôpital ?
Et la visite à 19h45 un autre soir. Il fait nuit, c’est au centre-ville. Oui, j’ai peur. Oui, je suis fatiguée. Oui, je me gare au plus proche du domicile des patients sur le trottoir. Et oui, je reçois un PV de 60 euros pour une visite à 33 euros. Si j’avais été un homme, moins peur, moins fatiguée, peut-être en 2 roues me serais-je quand même garée sur le trottoir ?
La médecine générale compte de plus en plus de femmes dans ses rangs, et celles-ci sont même majoritaire parmi les jeunes générations qui arrivent. Revoir l'organisation de la médecine générale, c'est aussi la revoir en ce sens; c'est privilégier le travail en groupe, avoir droit à des congés maternité (enfin ! grâce à MG France !) ou encore penser à la sécurité lors des gardes et visites à domicile.

Tiers payant : la pédagogie, c’est l’art de la répétition

J-C Calmes

Il va falloir que les médecins rajoutent une nouvelle corde à leur art. Et que politiques et administrateurs des mutuelles règlent le volume de leurs sonotones. Alors que les groupes de travail sont censés rendre des conclusions pour la loi santé en 15 jours, ils se réunissent pour réfléchir entre deux claquages de porte et constatent l’étendue de leurs divergences.

Devant tant d’agitation, le gouvernement ne sait plus très bien quand le texte va passer à l’Assemblée. En mars au mieux, en avril au pire. Pendant ce temps-là, certains ne perdent pas de temps et avancent leur solution. Les assureurs complémentaires - mutuelles, secteur privé et sociétés de prévoyance - ont, en effet trouvé la solution ultime qui tient en cinq points : garantie de paiement, délai de paiement garanti, assistance aux professionnels, outils informatiques et point de contact unique.

Les médecins généralistes et spécialistes qui le désirent pratiquent déjà le tiers payant.
Le voir simplifier est une bonne chose, que nous réclamons et l’annonce des complémentaires pourrait donc paraître intéressante. Mais ils ont oublié nos revendications !

Le tiers payant ne doit pas être obligatoire. Certains médecins ne souhaitent pas le pratiquer. Dont acte. Mais surtout, l’obligation entraîne de facto l’absence de moyens.
Pourquoi investir sur une pratique obligatoire? La logique économique étant ce qu’elle est, il y a fort à parier que si le tiers payant est obligatoire, il sera synonyme de complications inédites et insupportables pour les médecins.
Le tiers payant doit être en un seul flux. Or, à lire le projet, on s’aperçoit que les complémentaires ont prévu un flux vers le régime obligatoire et un flux vers les régimes complémentaires.
Le tiers payant doit se faire à partir de la carte vitale. Encore une fois, il semble que le projet de la mutualité prévoit une carte mutuelle en complément. De plus, la garantie de paiement est subordonnée à la consultation des droits en ligne de l’assuré. Si les délais de consultation sont les mêmes que les temps d’accès aux pages d’Espace Pro d'Ameli, il va falloir rallonger les journées de travail (2 mn par patient *30 patients= 1 heure de travail en plus).

On le voit la solution n’est pas encore trouvée et rien ne se fera sans l’accord des médecins

 

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