N° 55 - 04 décembre 2015
 

Médecine générale et production de données

Bernard Pledran

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Nous ne pourrons pas dire que nous n’avons pas été prévenus. L’épidémie de bronchiolite débute précocement cette année, et elle s’annonce sévère. La dépêche qui nous livre cette inquiétante information cite ses sources : l’INVS et SOS médecins. L’institut a recensé les passages aux urgences et SOS le nombre de visites effectuées chez les patients pour soigner cette pathologie.
Pendant ce temps-là, les médecins généralistes n’ont rien fait ! Comme d’habitude. Holà, arrêtez, rangez les fourches, ne pensez pas que j’insulte la profession !
Pendant ce temps-là, donc, les médecins généralistes n’ont rien fait ! Rien fait de « visible ». Rien fait qui soit évaluable par des données médicales, par des statistiques.
Pendant ce temps-là, donc, les médecins généralistes ont, simplement et sans manifestation visible, fait leur boulot. Ils ont suivi, entre autres, les patients atteints de cancers, de pathologies cardiovasculaires, dermatologiques ou endocriniennes. Ils ont rendu visite à domicile ou en EHPAD aux patients dépendants. Ils ont assuré les mille et une petites urgences du quotidien, participé à la permanence des soins. Ils ont fait tout ça et ils ont aussi, très probablement, constaté que l’épidémie de bronchiolite débutait précocement cette année et qu’elle s’annonçait plutôt sévère.
Ils ont fait tout cela les médecins généralistes, et plus encore. Mais le seul « hic », c’est que personne ne le sait, personne ne veut le voir. Parce que si la médecine générale produit énormément de données, ces données ne sont pas colligées et aucune synthèse n’en est faite. Je sais, c’est beaucoup plus compliqué à faire que recenser le nombre de passages aux urgences. Mais ce que sait faire SOS médecins, pourquoi ne pourrions-nous pas le faire ? Avec les outils informatiques dont la plupart d’entre nous, sommes maintenant dotés ce doit être possible. Il existe un dictionnaire des résultats de consultation qui est, je pense, intégré dans la plupart de nos logiciels professionnels. Pourrions-nous imaginer que ces données soient collectées par un serveur au service de la profession ? Qu’un état des lieux de tout ce que nous faisons, au quotidien, de manière invisible, soit établi ? Quel choc pour nombre de « politiques », de « responsables », qui méprisent tant notre travail, d’en constater l’ampleur !
« Le Vatican ? Combien de divisions » avait dit Staline. Il a eu tort le « petit père des peuples » de se moquer de la puissance morale que pouvait représenter cette Institution. Et les médecins généralistes, quelle force pourrions-nous représenter si nous prenions conscience de nos atouts et de la qualité de ce que nous produisons au quotidien ?

polsante.jpgEncore un plan pour l'hôpital !

Jean-Christophe Nogrette

Une seule spécialité libérale, essentielle, la médecine générale, voit ses effectifs en baisse.
Le secteur libéral des soins respecte ses objectifs budgétaires (ONDAM) depuis plusieurs années. Le pays reste suréquipé en lits d’hospitalisation. L’hôpital public reste un gouffre financier.

Rapprocher ces informations devrait conduire un gouvernement responsable à des décisions claires en faveur de la médecine générale, probablement à budget constant, en orientant une part plus importante des financements vers cette spécialité. Pour restaurer son attractivité et donc ses effectifs, ce gouvernement renforcerait ainsi un secteur qui a démontré son efficience.
Qu’observe-t-on dans les faits ? Le gouvernement prévoit un plan d’investissement pour revaloriser l’attractivité et les carrières … au sein de l’hôpital public ! On s’en doutait.
Les médecins urgentistes hospitaliers grognent une demi-journée. Ils obtiennent ce qu’ils demandent, soit 80 millions euros. L’hôpital public râle un peu plus : on lui donne sans sourciller 250 millions de plus.
Les médecins libéraux protestent unanimement contre une loi de santé mal ficelée qui ne règle aucun des vrais défis auquel le système de santé français doit faire face. Ils n’ont rien !
La médecine générale, spécialité essentielle pour l’accès aux soins des français, se meurt à petit feu. Elle ne reçoit rien.
Les médecins généralistes ne comprennent pas comment le gouvernement peut être aveugle et sourd à ce point. Il donne l’impression d’avoir décidé d’abandonner la médecine générale.
Il précipite le pays dans un système “tout hôpital”, qui n’est ni souhaitable ni souhaité par la population et les acteurs de la santé.
Il pérennise des solutions qui sont en échec et replâtre un hôpital qui explose à vouloir tout faire au lieu de le recentrer sur ses missions premières.
Il néglige la solution qui est le développement des soins primaires, en proximité, en leur donnant les moyens nécessaires.
Nous devons lutter de toutes nos forces contre cette “politique de santé” qui nous précipite dans le mur !

 

profession.jpgBig data et open data : l'information c'est le pouvoir !

Jean-Christophe Calmes

Vous entendez beaucoup ces mots sans forcément savoir à quoi ils correspondent.
Le Big data, c’est l’information de masse, et l’open data c’est la libre circulation de cette information. Deux notions a priori bien loin de notre métier. Et pourtant ! Les grandes manœuvres qui se jouent en ce moment, et dont la loi de Santé n’est qu’un épisode, ont toutes pour but de s’assurer le contrôle d’une richesse extraordinaire sur laquelle nous sommes assis sans le savoir. Le fameux Big data.

 

La masse des données médicales que contiennent nos dossiers est, pour autant qu’elles soient exploitées, une ressource financière extraordinaire. Mais qui en profitera ?
Organisées, séquencées et couplées à d’autres données fournies à l’insu de leur plein gré par nos patients hyper connectés, grâce aux GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), au travers de leurs smartphones et montres, ces données représentent le rêve de l’assureur.
Elles permettront de prévoir par des algorithmes l’évolution de tel ou tel patient en fonction des données recueillies et détermineront le montant de sa prime d’assurance. Surtout avec un séquençage d’ADN obligatoire avant la signature de tout contrat. Google le propose déjà pour 99 dollars.
L’assureur informé grâce à l’Open data, est alors à même de déterminer la meilleure stratégie thérapeutique et de proposer à son patient-client de se tourner vers le médecin—prestataire-contractualisé pour mettre en application un traitement « e-optimisé ».
Ce monde cauchemardesque du « disease management » est en marche et nous menace si nous n’y prêtons pas attention.
La loi de santé était l’occasion de réussir le virage ambulatoire, consacrant la place centrale du médecin traitant et la relation singulière, humaine, éthique, médecin-patient comme le cœur du système de soin. C’est raté !
La loi de santé était l’occasion de réaffirmer l’attachement de la nation au système de soins solidaire qui est le nôtre. Mais, le tiers payant généralisé obligatoire en incitant les médecins à contractualiser individuellement avec les opérateurs de soins peut constituer (outre la charge de travail ingérable qu’il représente) le début du scénario décrit. Ce qui explique les réticences de l’ensemble du corps médical.
Il appartient aux médecins généralistes et aux patients de résister à ce monde merveilleux pour les assureurs et cauchemardesque pour les utilisateurs, où la normalisation des thérapeutiques constituera la négation de l’essence même de notre métier, basé sur la richesse et la singularité de la relation humaine.

metier.jpgJeunes généralistes en burn-out : attention à la fracture !

Florence Lapica

Une jeune généraliste de 33 ans, installée depuis 2 ans dans un village de 1600 habitants à 20 km de Lyon, est associée à une généraliste du même âge. Toutes deux partagent leurs locaux avec 3 infirmiers libéraux. Cette dernière est, depuis un mois, en arrêt pour dépression et pense arrêter la médecine générale pour faire de l’hypnose. Une autre de ses amies, généraliste, se tourne vers le salariat à la suite d’épisodes dépressifs et une 3ème est en difficulté après seulement un an d’installation en maison de santé pluri-professionnelle. Voici ce que disent ces jeunes médecins….

"Nous nous sommes installés en connaissant les réalités de l’exercice. Nous avons mis des garde-fous : nous veillons à l’équilibre vie privée/vie professionnelle, nous ne sommes pas isolés, nous nous formons. Et pourtant après moins de 5 ans d’exercice, nous sommes en difficultés.
Nous qui nous sommes installés tôt, après la sortie de l’internat, nous sommes des généralistes "ultra-motivés". Nous avons choisi la médecine générale. Nous nous sommes souvent investis dans la profession (enseignement, formation, association ou syndicat). Et pourtant nous ne sommes pas à l’abri du burn-out ou souffrance morale liée au travail.
Nous connaissons le diagnostic et les difficultés de l’exercice quotidien. Nous avons des propositions, mais elles ne sont pas entendues pour l’instant. Cet exercice, c’est bien sûr les maladies chroniques, aigües, les nourrissons, la fin de vie. Tout cela est bien le reflet d’un métier passionnant, indispensable à la population. Mais dans l’ombre, c’est aussi la gestion de la secrétaire malade, la gestion des hospitalisations de nos patients - parfois très chronophage -, l’appel des ambulanciers, la recherche d’une place dans le service adapté. C’est aussi répondre aux multiples courriers de la sécu, pour des demandes de précisions pour des ALD, pour des prescriptions de transports, ou des arrêts de travail, Que d’énergie dépensée, en sus de nos consultations !
Souvent, nos ainés nous reprochent de ne pas vouloir travailler, de ne pas vouloir nous installer. Ils pensent que l’installation de jeunes médecins généralistes permettra d’améliorer leur exercice quotidien. Mais ce ne sera pas le cas si les conditions de travail actuelles usent prématurément les jeunes médecins. Je pense qu’il faut faire attention à cette fracture "jeunes/aînés" au sein de la profession. Les différentes générations ne sont pas responsables des maux des autres. Il faut que nous soyons solidaires, car nous partageons les mêmes difficultés et nous partageons surtout la passion et la fierté de la médecine générale."

pratique.jpgConsommation de médicaments en France : la fin d'un mythe

Gilles Perrin

Voici une affirmation souvent ressassée : la France serait championne d'Europe en matière de consommation de médicaments. Pourtant, depuis 2012 cette évolution s'est tassée et le dernier rapport de l'OCDE sur la santé en 2015 montre que nous ne sommes plus que le 5ème pays européen en matière de consommation de médicaments en Europe.

Désormais, avec 596 dollars dépensés par habitant, nous sommes dépassés par l'Allemagne (678 dollars par habitant), la Suisse (666 dollars), l'Irlande (652 dollars) et même la Belgique (603 dollars) !
Au niveau du classement mondial, la France ne se situe qu'au 9ème rang, bien loin des USA qui en consomment près de deux fois plus que nous (1026 dollars)

Cette évolution est le fruit d’une conjugaison de facteurs liés aux politiques de maitrise des coûts engagés depuis quelques années (déremboursements, baisse des prix, nouvelles franchises, scandales à répétition (Médiator, pilules de 3ème génération…), maitrise des prescriptions etc.) et aux campagnes de communication grand public (antibiotiques, génériques) qui ont freiné les prescriptions et donc les dépenses.
Au final, le "reste à charge" des assurés en France est encore un des plus faibles au monde : seulement 17 % (pour une moyenne de l'OCDE de 37%), grâce aux assurances complémentaires qui absorbent 14 % des remboursements de médicaments en France, en augmentant régulièrement leurs tarifs !

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Avec la Cop21, l'AEE dresse son constat

La pollution atmosphérique constitue le premier risque sanitaire d'origine environnementale en Europe. Elle raccourcit l'espérance de vie des personnes affectées et contribue à l'apparition de maladie grave (maladie cardiaque, troubles respiratoires et cancer). Le rapport 2015 de l'Agence Européenne pour l'Environnement (AEE) sur la qualité de l'air en Europe dresse le bilan de l'exposition de la population européenne aux polluants atmosphériques et fournit un aperçu de la qualité de l'air fondé sur les données de stations de surveillance officielles dans toute l'Europe.

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Selon la CNAMTS, la part des installations en secteur 1, toutes spécialités confondues, est restée stable en quatre ans, à 41 % en 2011, contre 40 % en 2014. Parallèlement, "celle du secteur 2 hors contrat d'accès aux soins (CAS) baisse pour passer de 59 % en 2011 à 43 % en 2014 et devient donc minoritaire", souligne l'Assurance-maladie, qui estime que le CAS a permis un recul des installations en secteur 2 hors CAS.

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