MG France invite les médecins généralistes à se mettre une nouvelle fois en grève lundi 5 octobre et à rester mobilisés jusqu'à ce que la ministre de la Santé réponde concrètement à leurs attentes et demandes. L'Assemblée nationale qui vient de se saisir à nouveau de la loi de modernisation du système de santé doit retirer du texte l'obligation du tiers payant et indiquer clairement quels moyens nouveaux seront donnés aux soins primaires pour faire face aux défis auxquels ce derniers sont affrontés.
Nombreux sont les cabinets médicaux qui annonçaient cette semaine leur volonté de garder leur porte close ce lundi 5 octobre. "Nous constatons une mobilisation en hausse constante qui s'étend en tache d’huile dans des régions très motivées, et partout une même détermination à défendre une profession en danger", commente dans ce registre Jacques Battistoni, secrétaire général de MG France à l'issue de la conférence de presse organisée jeudi dernier au siège du syndicat. "La pression qui s’exerce sur les généralistes est de plus en plus lourde, ajoute ce dernier. Tout ce qui la majore (notamment le tiers-payant et le dépôt d’un Cerfa Accessibilité ...) leur est, à juste titre, intolérable".
Alors que la ministre de la Santé s'apprête à fêter les 70 ans de la Sécurité sociale, les généralistes entendent lui faire savoir à l'avance leur mécontentement croissant face à une situation qui, dans le champ des soins primaires, empire année après année. Dès Jeudi 1er octobre, les généralistes d'Ile-de-France, du Puy-de-Dôme, de la Haute-Loire, de la Drome, de Savoie, de Normandie, de Vendée, du Languedoc-Roussillon, d'Aquitaine ou encore de Paca ont déjà fait connaître leur intention de fermer leur cabinet médical. D'autres régions vont leur emboiter le pas. "La mobilisation ne faiblira pas", explique à cet égard le président de MG France, Claude Leicher qui souligne que les reconductions de la grève se feront sur décision des médecins sur le terrain.
Après le récent dépot, en septembre, d'un recours auprès du directeur de la CNAMTS visant à rétablir l'équité entre toutes les spécialités et permettre aux spécialistes en médecine générale de coter leur acte de base à 25 euros, MG France a fait savoir qu'il n'a pas obtenu de réponse de l'Assurance-maladie à sa demande sur la MPC (2 euros) pour les généralistes et qu'il va déposer un recours en Conseil d'Etat. "La crise démographique s'aggrave, parce que l’attractivité d’une profession se mesure à ses revenus et à ses conditions d’exercice et que la médecine générale est une des spécialités les moins bien loties", note Jacques Battistoni. "C'est une des explications principales de la désaffections des jeunes pour notre métier", ajoute Claude leicher qui rappelle que ce refus de l'Assurance-maladie a déjà coûté près de 10 000 euros par an à chaque généraliste. "Nous travaillons 30 % de plus pour 30 % de rémunération en moins. Cette situation ne peut plus durer !"
Enfin, le dossier sur l'accessibilité des personnes handicapées aux cabinets médicaux est également au centre des préoccupations de MG France. Une minorité de professionnels de santé a été en mesure de déposer un Ad'Ap à la date du 27 septembre et un grand nombre de ceux qui l'ont fait risquent de le voir refusé. Car un grand nombre de cabinets médicaux sont confrontés à de nombreuses difficultés : matérielles (locaux en centre-villes, immeubles anciens), financières (disproportion entre coût des travaux et recettes), pratiques (Cerfa inadapté). De plus, de nombreux départs en retraite sont programmés dans les années à venir. "Nous restons favorables à l’accessibilité des personnes handicapées à tous les services et en particulier à celui de leur médecin traitant", précise le président de MG France. "Mais nous demandons un moratoire et un report de la date limité de dépot. Les règles d'accessibilité doivent être adaptées pour qu'aucun cabinet existant ne soit contraint à fermer ses portes."
JJC
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Claude leicher : "La population nous soutient car elle est inquiète"
Pourquoi appelez-vous les médecins généralistes à se mettre en grève le 5 octobre ?
Les médecins généralistes vont se mettre en grève pour protester contre l’élément principal de la loi de modernisation du système de santé qui leur pose problème, qui est l’obligation du tiers payant. Cette obligation est infaisable pour un cabinet de médecin généraliste confronté à un trop grand nombre de mutuelles et de régimes d’assurance-maladie obligatoires et qui entraînera une paperasserie trop importante. Les médecins ne pourront pas gérer ce tiers payant obligatoire. Nous souhaitons que le gouvernement le comprenne en retirant de sa loi l’obligation du tiers payant et qu’on ne puisse pas faire reproche aux médecins de ne pas appliquer cette mesure. La population la réclame et nous le comprenons bien. Mais la plupart des médecins n’ont pas de secrétariat et n’ont pas la capacité de le faire.
Comment se présente ce mouvement ?
La grève démarre le 5 octobre avec une mobilisation beaucoup plus forte qu’habituellement. Les médecins généralistes décideront localement quel jour ils veulent fermer. Nous avons déjà beaucoup d’endroits où les médecins nous ont dit qu’ils fermeront au moins trois jours, voire plus pour certains. Nous avons à ce jour nettement le sentiment d’une mobilisation forte.
Ne risquez-vous pas de gêner vos patients ?
Nous sommes tout à fait conscients de la gêne que cette grève va occasionner auprès de nos patients. Certains nécessitent des soins continus et les médecins se sont organisés pour y répondre. Il y a donc un souci de garantir la sécurité de la population. Des réquisitions seront sans doute faites par les Agences régionales de santé là où il y aura des fermetures en nombre. La population nous soutient car elle est inquiète : elle constate que l’âge moyen des médecins augmente et voit que lorsqu’un médecin part à la retraite il n’y a souvent pas de successeur à son cabinet médical. 2500 médecins généralistes partent en retraite chaque année et 1000 médecins s’installent. Les 1 500 médecins qui vont manquer chaque année vont impacter les zones rurales profondes, les petites villes, les villes moyennes et de plus en plus les grandes villes et leurs quartiers. Certaines sont déjà en très grande difficulté, par exemple en Ile-de-France. Aujourd’hui la première plainte de la population est de dire « j’ai du mal à trouver un médecin », « que vais devenir si mon médecin s’en va ? », « qui va me soigner demain ? ». La réponse pour l’instant est : « Personne » ! Il est grand temps de doter les médecins généralistes de nouveaux moyens et d'investir massivement dans les soins primaires.