La réponse aux DSNP : une demande de la population, un enjeu important pour les élus et les médecins généralistes libéraux

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Actualités
La réponse aux demandes de soins non programmés (DSNP) est une problématique émergente qui interpelle aujourd’hui fortement les responsables politiques.
Par le passé l’accès à une consultation de médecine générale était régulée par les règles de libre concurrence entre les différents cabinets de médecine générale libérale.
Aujourd’hui, le contexte de crise démographique professionnelle au sein de la médecine générale libérale fait que ce mécanisme de régulation n’est plus totalement opérant.
Cependant, le flux de DSNP ne trouvant pas de réponse dans la journée auprès des cabinets de médecine générale libérale ne doit pas occulter l’ampleur de la tâche assumée chaque jour par la médecine générale qui, avec près de 280 millions de consultations par an, reste de très loin le premier offreur de soins du pays.
Si 20 % des patients vus chaque jour en médecine générale libérale sont des patients qui ont sollicité un rendez-vous dans la journée même, ceci représente 56 millions de réponses à des DSNP par an. À titre de comparaison les services d’urgence hospitaliers comptent 21 millions de passages par an en 2018. 
 
Si l’on reprend les résultats de l’enquête de la DREES de 2013, 75 % de ces passages sont enregistrés entre 8 heures et 20 heures et 67 % correspondent à des patients venant de leur domicile ou du secteur médico-social et notamment des EHPAD. Cela représente 10,6 millions de passages aux urgences pour lesquels la médecine générale libérale aurait potentiellement pu être sollicitée en première intention pendant les heures d’ouverture de journée des cabinets. 
 
Si l’on se place volontairement sur une hypothèse haute où 70 % de ces situations auraient pu être gérées par la médecine générale libérale sans recours aux services d’urgence, sous réserve que lorsque nécessaire elle est un accès rapide aux plateaux techniques, cela nous ramène potentiellement à 7,4 millions de DSNP qui n’auraient pas trouvé une réponse auprès des cabinets de médecine générale. Le défaut de réponse de la médecine générale au DSNP serait donc de l’ordre de 11,7 %, ce qui représente en moyenne moins d’un acte par jour et par médecin généraliste.
Cette démonstration ne vise pas à nier la réalité d’un vrai problème vécu par la population, mais seulement de bien resituer l’échelle du problème.
 
Ceci conduit aux conclusions suivantes:

Les solutions

 

a. Une révolution culturelle à porter :

Si la prise en charge de sa patientèle reste la base de l’exercice libéral du médecin généraliste, il faut dorénavant organiser un nouvel échelon de responsabilité qui est celui de l’accès aux soins sur le territoire sur lequel se situe son cabinet. Ceci ne peut réussir que dans le cadre de politique gagnant-gagnant : gagnant pour la population par un meilleur accès aux soins, gagnant pour les professionnels par une amélioration de leurs conditions d’exercice.
 

b. Une révolution organisationnelle :

La loi a institué les CPTS qui sont un instrument au service de cet objectif de responsabilité territoriale. Cette nouvelle mission est hors de portée d’un médecin isolé ou d’un cabinet isolé et doit impérativement être porté collectivement par l’ensemble des médecins généralistes du territoire. Le corollaire est donc la nécessité d’une organisation collective qui nécessite elle-même des outils et des moyens :
Déploiement du 116-117 comme numéro d’appel national pour avoir recours à un médecin généraliste libéral en cas d’indisponibilité de son médecin traitant,
Une régulation médicale libérale de journée organisée et pilotée par la médecine générale,
Une incitation à organiser différemment les plannings de rendez-vous en redonnant une place plus large au DSNP :
       - plages de rendez-vous réservées aux DSNP du jour chez chaque médecin généraliste      
      -  organisations collectives avec secrétariat collectif et plannings partagés permettant, en lien avec la régulation médicale libérale, de proposer une solution alternative dans un autre cabinet de médecine générale lorsque le médecin traitant est indisponible. Un retour d’informations vers le médecin traitant devra être systématique.
 
Dans ce cadre les consultations acceptées sur demande de la régulation médicale devront faire l’objet d’une majoration d’acte ou d’une valorisation par l’intermédiaire d’une indemnité d’astreinte.
Et plus globalement les coûts financiers générés par l’organisation collective devront être garantis par des lignes budgétaires attribuées au CPTS.
 

c. Étoffer l’offre de soins en médecine générale libérale :

Les incitations à l’installation de nouveaux médecins doivent bien sûr être poursuivies tout en comprenant bien que dans le contexte actuel toute mesure coercitive ne conduirait qu’à une dégradation rapide de la situation.
Mais parallèlement, il faut permettre à la grande majorité de médecins généralistes qui exercent dans des zones où une problématique d’accès aux soins est avérée, d’étoffer les disponibilités médicales de leur cabinet en autorisant le recrutement de médecins remplaçants pouvant travailler concomitamment avec le médecin titulaire.  
 
On comptait en 2017 en France 55 300 médecins généralistes libéraux selon le CNOM, parmi lesquels moins de 51 000 ont une activité de médecin traitant identifiée, et plus de 7 000 médecins remplaçants réalisant des remplacements en médecine générale.
Ces médecins remplaçants ne peuvent à ce jour, à de rares exceptions près, être recrutés que sur les périodes d’absence du médecin titulaire. 
Le projet de loi de transformation de notre système de santé introduit un cadrage des conditions de recrutement d’un médecin adjoint. C’est une opportunité d’instituer une réponse simple sur le plan administratif et autorisant toute la souplesse indispensable : un même médecin adjoint doit pouvoir partager son activité hebdomadaire ou mensuelle entre plusieurs cabinets et répondre ainsi aux besoins des CPTS en renfort médical.
Enfin, les cabinets de médecine générale souffrent du fait que leurs chiffres d’affaires ne leurs permettent pas d’embaucher le personnel qui leur permettrait de se réorganiser en libérant du temps médical et en apportant de la souplesse dans la prise en charge des patients. Les négociations conventionnelles en cours, et notamment celles portant sur l’assistant médical, peuvent constituer des éléments de réponse sous-réserve que le dispositif mis en place soit simple, clair, suffisamment souple pour s’adapter à l’hétérogénéité des cabinets médecine générale et qu’il apporte des garanties suffisantes sur le moyen et long terme pour des embauches de personnel.
 

3. Un nouveau contrat entre le monde politique et la médecine générale libérale

Dans un contexte de démographie professionnelle de la médecine générale libérale en berne, les débats autour de la réponse aux DSNP sont essentiellement sous-tendus par deux visions qui s’opposent :
 
Soit organiser ce qu’un ancien président de MG France avait qualifié de « vente par appartements de la médecine générale » pour soi-disant décharger le médecin généraliste d’une partie de ses activités de soins au profit d’autres professionnels de santé : sages-femmes, infirmières, pharmaciens… On ne voit plus passer un PLFSS ou un projet de loi de santé sans nouvelles attaques contre la médecine générale. Même le principe de l’indépendance entre celui qui prescrit et celui qui délivre les médicaments est aujourd’hui remis en cause. 
Et c’est encore sans compter sur les mouvements d’ubérisation de la médecine qui pourraient profondément modifier la donne si nous ne sommes pas vigilants.   
L’effet d’aubaine espéré à court terme se soldera de toute évidence à moyens et longs termes par une nouvelle baisse d’attractivité de cette belle spécialité de la médecine générale dont le fondement est de s’intéresser au patient dans sa globalité et sur la durée, et par des impacts très négatifs en termes de santé publique.
 
Soit s’appuyez sur l’existant, sur ce maillage territorial de médecins généralistes qui même s’il est actuellement en difficulté est encore loin d’être catastrophique, en le renforçant, en lui donnant les moyens de se réorganiser, de se moderniser et de passer le cap difficile, et ainsi de retrouver à long terme une forte attractivité pour les générations de jeunes médecins. Dans cette optique, les prises en charge des autres professionnels des soins primaires ne doivent pas se faire en parallèle de celle du médecin traitant, mais bien dans le cadre d’une concertation interprofessionnelle dans l’intérêt même du patient.
Les médecins généralistes ne sont pas responsables des errances observées depuis les années 80 sur les choix politiques quant à l’organisation de notre système de soins. Ils restent cependant mobilisés pour imaginer une organisation des soins cohérente et qui réponde aux nouveaux défis. La réussite dépend d’un portage politique fort et c’est bien là l’intérêt d’un nouveau contrat de société. 
 

4. Les problématiques particulières du samedi matin et du créneau 19h20 heures en semaine

Actuellement, les horaires de la PDSA sont définis dans le Code de la santé publique de la façon suivante :
en semaine de 20 heures à 8 heures le lendemain,
le samedi à partir de 12 heures,
sur l’ensemble des 24 heures pour les dimanches et jours fériés.
Après avoir déduit les créneaux horaires de la PDSA les médecins généralistes sont censés assurer une continuité des soins pour leurs patients sur les 64 heures hebdomadaires restantes. 
Ceci ne correspond plus aux standards sociétaux actuels, et les jeunes générations sont attachées à un meilleur équilibre entre temps de travail et temps consacré à la famille.
 
Dans les grandes villes, une régulation médicale des appels a déjà, le plus souvent, été instituée les samedis matin, ceci relevant d’accords négociés avec les ARS. Par contre, la mise en place d’astreintes de médecins effecteurs se heurte à l’impossibilité de coter les majorations d’actes habituellement utilisées le samedi après-midi sur le samedi matin. Cela dépend d’accords conventionnels qui reposent eux-mêmes sur la définition réglementaire des horaires de la PDSA. La régulation médicale se trouve donc en difficulté n’ayant pas d’effecteur à proposer au patient sur le samedi matin lorsqu’un examen médical s’avère nécessaire.
De la même façon, sur les fins d’après-midi, les régulations des centres 15 observent de pics d’appels qui ne peuvent être correctement gérés avant l’ouverture officielle de la PDSA à 20 heures. De même, les régulations médicales libérales observent un flux d’appel important lorsqu’elles ouvrent à 20 heures, constitué en partie de patients qui attendent depuis un moment.
 
 
Il est donc souhaitable à la fois pour améliorer l’accès aux soins mais aussi pour alléger les fortes contraintes professionnelles des médecins généralistes de proposer une modification du Code de la santé publique permettant aux départements qui le souhaitent d’étendre les plages horaires de la PDSA au samedi matin de 8 heures à 12 heures et au soir de semaine de 19 heures à 20 heures. L’amplitude horaire hebdomadaire de la continuité des soins que doivent organiser les médecins généralistes pourra ainsi être ramenée de 64 heures à 55 heures. Ceci fait donc l’objet d’un amendement proposé par MG-France. 
 
 
 
Contacts
Jacques Battistoni – Président – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. – 06 62 61 09 99
Jean-Louis Bensoussan – Secrétaire général – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. – 06 14 55 48 68
Rolan Rabeyrin – Chargé de mission PDSA et DSNP au sein du Comité Directeur – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. - 06 71 08 42 43
Badis Hadrouf – Délégué national au sein du Comité Directeur - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. – 06 62 16 41 75
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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