La nouvelle donne sanitaire du vieillissement

En 2060, la proportion des personnes âgées de plus de 80 ans dans la population aura doublé par rapport à 2010 pour atteindre environ 8,4 millions d’individus, conséquence d’une évolution forte de l’espérance de vie (de 79 ans pour les hommes en 2016 à 86 ans en 2060, et de 85 à 91,1 ans pour les femmes). Le nombre de personnes âgées dépendantes, de 1,150 million devrait quant à lui passer à 1,555 en 2030 pour atteindre 2,3 millions d’individus en 2060. La prise en charge de ces populations ne devrait pas manquer d'alourdir le travail des médecins généralistes.

« Le vieillissement de la société française soulève dès lors la question de la prise en charge de cette dépendance dans un contexte de ressources financières limitées », commente dans ce registre la Cour des Comptes dans son dernier rapport (1) consacré au maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie. Différents « plans » ont été adoptés ces dernières années pour préparer notre société à affronter les défis du vieillissement et de son corollaire, la perte d’autonomie d’un nombre croissant de Français. Ils ont pour nom «vieillissement et solidarité» (2003), «solidarité grand âge» (2006), plan «Alzheimer» (2008-2012) ou encore plan «Maladies neurodégénératives» (2014-2019). Un rapport de février 2014 sur l'"Adaptation de la société au vieillissement", fruit d'une concertation menée dans le cadre de la préparation du projet de loi d’orientation et de programmation pour l’adaptation de la société au vieillissement, les a complété sur les chapitres sociaux. Tous ont largement décrit par le détail les conséquence de l'allongement de la vie pour notre société et les enjeux que représentent les années gagnées au plan sanitaire.

La loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées a créé l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et a favorisé le développement de services de soins et d’accompagnement à domicile, ainsi que de nouvelles formules intermédiaires (accueil de jour, hébergement temporaire). Entre 2006 et 2014, le nombre de lits en maisons de retraite est passé de 443 387 à 573 557, soit une progression de 30 %. Mais cette augmentation ne suffira pas à absorber la demande de soins qui ne va pas manquer de se manifester dans les prochaines années.

Une étude menée par l'IRDES (2) fait ainsi valoir que dans les rangs des individus de plus de 65 ans dits "fragiles", le recours au médecin généraliste est important (9,5 fois par an). Ces derniers voient un généraliste 2 fois plus souvent que les individus dits "robustes" de la même tranche d'âge. L'étude souligne que le montant moyen de dépenses ambulatoires des 65 ans et plus en 2012 est d’environ 2 600 euros par personne. Le surcoût de la fragilité est estimé de 1770 à 1270 euros par an et par personne en 2012. "Si l’on souhaite conserver une idée générale du coût de la fragilité, on pourrait dire qu’un individu pré-fragile dépensait en soins ambulatoires environ 3 200 euros en 2012, et un fragile dépensait près de 4 000 euros." Autrement dit : le montant moyen des dépenses de santé ambulatoires des personnes âgées de 65 ans et plus augmente avec le niveau de fragilité. D'où l'importance d'une prise en charge adaptée à l'état de santé de la personne.



90 % pour le maintien à domicile

« L’offre de prestations a ainsi connu une amélioration significative, tant en quantité qu’en qualité de prise en charge », commente de son côté la Cour des Comptes, qui note encore que loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement « devrait conforter cette évolution. ». Des différentes enquêtes menées auprès des structures en charge de la dépendance, il ressort qu’un consensus très net se dégage en faveur du maintien à domicile. « 90 % des Français expriment une préférence pour ce mode de prise en charge, ce qui ne les différencie pas, du reste, de leurs voisins européens », ajoute la Cour.
Pour assurer cette préférence, les proches aidants sont mis à contribution : pas moins de 8,3 millions de personnes de 16 ans et plus aident de façon régulière une ou plusieurs personnes de leur entourage, touchées par des problèmes de santé ou de handicap. Reste, souligne le rapport, que « les Français souhaitent que les pouvoirs publics s’impliquent dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes ».

Avec une charge financière répartie à égalité entre la famille et les pouvoirs publics, notre pays n’a pas retenu l’option d’une assurance dépendance obligatoire (5è risque) à contrario de l’Allemagne qui a mis en place cette branche nouvelle au 1er janvier 1995. Outre-Rhin, 2,5 millions de personnes en bénéficient à ce jour et 70 % de ses bénéficiaires vivent à domicile.

Réformer la tarification

La principale difficulté attenante à cette prise en charge demeure en France l’absence de connaissance précise des parcours des personnes âgées en perte d’autonomie, « ce qui rend difficile la définition d’une véritable programmation de l’offre », souligne encore la Cour des Comptes. « Le développement de services d’aide à domicile, la diversification des actions proposées, un recrutement de personnel et une formation adaptés aux intervenants seraient de nature à éviter les ruptures dans les parcours par une meilleure coordination de l’offre de proximité ».

La conférence des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées créée dans chaque département par la loi de décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, devrait permettre des progrès dans l’identification des besoins locaux. Mais la question de l’harmonisation des programmations par les divers acteurs concernés (communes, départements, ARS, etc.) de l’offre des services destinés aux personnes âgées dépendantes « reste encore non résolue », ajoute la Cour.

« D’une manière générale, les services de soins et d’accompagnement à domicile devraient être encouragés à se regrouper, à mutualiser les fonctions support et à mettre à profit les technologies facilitant l’animation d’équipes itinérantes, voire de relayer l’intervention des professionnels en leur absence du domicile des personnes âgées. » Il ne manque plus à cet effet, qu’une réforme de la tarification des services d’aide et de soins à domicile comme de celle des médecins généralistes traitants en première ligne avec les personnes âgées dépendantes vivant à domicile.

La revalorisation de la visite longue (VL) par le médecin traitant pour les patients atteints de pathologies graves responsables de handicap sévère moteur et / ou intellectuel et pour la prise en charge des patients en soins palliatifs à domicile, qui devrait être relevée à hauteur de 60 euros (pour 3 visites par an), répond à une demande pressante des médecins libéraux qui souhaitent mieux coordonner leurs interventions avec les autres professionnels de santé concernés. Elle s'ajoutera à la hausse du forfait médecin traitant pour les plus de 80 ans (70 euros par an et par patient en ALD et 42 euros pour les plus de 80 ans). Ces revalorisations viennent d'être consignées dans le protocole de fin de négociations conventionnelle signé le 28 juillet par le syndicat des généralistes MG France et le BLOC (chirurgien). Elles marquent la volonté de l'Assurance-maladie de tenir compte de cette nouvelle donne sanitaire que constitue le vieillissement.

J-J Cristofari

(1) Le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie, une organisation à améliorer, des aides à mieux cibler, rapport public, juillet 2016
(2) "Vieillissement, fragilité et dépenses de santé", Questions d'économie de la santé, N° 216, mars 2016

 

Slider
 

Newsletter

 
 

Formations

 
 

Informations

 
13, rue Fernand Léger, 75020 PARIS 01 43 13 13 13 services@mg-france.fr

Paramétrages de cookies

×

Cookies fonctionnels

Ce site utilise des cookies pour assurer son bon fonctionnement et ne peuvent pas être désactivés de nos systèmes. Nous ne les utilisons pas à des fins publicitaires. Si ces cookies sont bloqués, certaines parties du site ne pourront pas fonctionner.

Pour en savoir plus sur la politique de cookies

Mesure d'audience

Ce site utilise des cookies de mesure et d’analyse d’audience, tels que Google Analytics, afin d’évaluer et d’améliorer notre site internet.

Contenus interactifs

Ce site utilise des composants tiers, tels que NotAllowedScript660667e0abb33ReCAPTCHA, qui peuvent déposer des cookies sur votre machine. Si vous décider de bloquer un composant, le contenu ne s’affichera pas

Réseaux sociaux/Vidéos

Des plug-ins de réseaux sociaux et de vidéos, qui exploitent des cookies, sont présents sur ce site web. Ils permettent d’améliorer la convivialité et la promotion du site grâce à différentes interactions sociales.

Autres cookies

Ce site web utilise un certain nombre de cookies pour gérer, par exemple, les sessions utilisateurs.